14 mai 2022

Montréal démasquée

Taxi vers le centre-ville à 15h. La canicule (32° à l’ombre, 35° au soleil) a vidé les trottoirs de badauds et rempli les parcs et les piscines publiques de bronzeurs et pique-niqueurs, surtout que le masque de la Covid-19 a disparu (sauf dans les poubelles de bord de route!). Dans le Plateau, sur Mont-Royal et Saint-Denis, les piétons reparaissent en couples et en grappes, toujours du côté «umbra» comme on dit à Madrid. Je débarque à Rachel et m’insère en boitillant dans le cortège. L’Académie à l’angle de Duluth, temple de la moule-frites depuis 30 ans que je croyais éternel, a fermé ses portes mais cent pas plus loin le café-brasserie «Auprès de ma blonde» offre une chope de Cheval Blanc et un plat de moules au vin blanc… et sous un parasol orangé la binette ravie d’un vieux copain pianiste perdu de vue depuis près de quarante ans. Irrésistible. Trois serveuses, un uniforme: short et débardeur noir plongeant.  La plus sexy l’exploite au max, la mince-mince s’en accommode avec élégance,  la rondelette à lunettes le subit en grinçant. J’ai beau avoir promis à Azur que je rentrerais tôt, je pense qu’elle va m‘attendre un brin.

03 mai 2022

Interactions

Les quatre «grandes questions» dont je crois qu’elles se posent  en priorité à l’Humanité du 21e siècle semblent bien distinctes et disparates, et chacun est tenté de les traiter séparément et de leur créer un ordre arbitraire d’importance selon ses propres intérêts. Or, elles sont étroitement interreliées, et c’est une erreur majeure de vouloir les subordonner les unes aux autres, même si dans la pratique on peut les ordonner par leur apparition dans notre évolution. 

  1. Clairement, l’écologie, dans le sens de la santé de l’environnement où nous vivons, vient en premier lieu. Elle précède même notre existence et constitue le cadre général de notre vie et de nos activités, d’autant plus que certains auteurs, dans la foulée de Murray Bookchin, en élargissent la portée par la notion d’«écologie sociale».
  2. La technique est née avec le premier hominien («homo faber») qui a instinctivement fabriqué un outil n’existant pas tel quel dans la nature. Sa descendante la technologie, en particulier celle qui a trait à la création, à la gestion et à l’utilisation de l’information dont nous avons besoin pour fonctionner et communiquer, joue un rôle clef et croissant dans la transformation de l’environnement, pour le meilleur comme pour le pire.
  3. L’évolution du travail, d’abord dans le sens abstrait de toute activité productive ou transformative en particulier au moyen d’outils créés par l’homme, est le second facteur majeur de modification de l’environnement. Dans le sens économique et social des occupations qui permettent aux humains de subsister, elle est directement affectée aussi bien par la santé de l’environnement que par la technologie, dont les avances non seulement changent la nature de ces occupations, mais rendent bon nombre de celles-ci désuètes et inutiles, provoquant par le fait même des ruptures dans la distribution de la richesse commune qui permet à l’espèce de subsister.
  4. L’impact combiné de l’évolution technologique et des bouleversements causés dans le  marché du travail par ses interactions avec l’écologie, et donc dans le système économique dominant sur la planète, est une des causes directes et indirectes d’un mouvement massif de populations, des pays plus pauvres et plus violents vers les plus riches et plus paisibles, qui provoque des chocs conflictuels entre des populations dont l’histoire, les coutumes et les croyances sont souvent sans communs points de convergence.

Mais les impacts ne vont pas que du haut en bas de la liste. Chacun de ces éléments joue aussi un rôle dans ceux qui le précèdent. Par exemple, les mouvements de population affectents plus ou moins directement le marché de l’emploi des pays d’accueil, et l’écart dans le niveau d’éducation et d’expertise des nouveaux venus interagit de manière complexe avec le contexte de plus en plus technologique du milieu de travail. Les différences de culture et de coutumes entre les populations juxtaposées peuvent aussi affecter, en bien et en mal, la santé de l’environnement.

En conséquence, il est indispensable que politiquement, économiquement et socialement, les quatre questions soient considérées non seulement dans leur spécificité propre, mais en tenant soigneusement compte de leurs multiples interactions.