31 mars 2017

Populisme?

Une réaction à chaud à ce qui se passe un peu partout dans le monde. 
Il faut que la gauche cesse de réagir négativement contre le populisme — ce qui revient à laisser le champ libre à l'extrême-droite dans les classes populaires — et le prenne à bras-le-corps. C'est de ce côté que résident les vrais instincts des «gens ordinaires», la vraie perception des difficultés qui ruinent leurs vies, la vraie et puissante source de transformation qu'est leur colère profonde et justifiée. 
Oublions nos débats, si intelligents soient-ils, de bien-pensants et notre savante recherche dans les vieux textes gauchistes pour de vieilles réponses à leurs problèmes nouveaux et urgents. Il ne faut pas leur proposer des sauveurs charismatiques ni perdre du temps à dénigrer ceux qui les égarent. Il ne faut pas leur prêcher des solutions miraculeuses venues d'en haut. 
Il faut inciter TOUS les protestataires (y compris ceux qu'on juge «répugnants», même racistes, même xénophobes, même sexistes, ce sont sans doute ceux qui en ont le plus besoin et, qui sait, ceux qui auront les apports les plus utiles) à créer eux-mêmes des solutions nouvelles, appropriées, aussi satisfaisantes émotivement qu'intellectuellement. Le rôle vraiment efficace des militants progressistes est de leur offrir en toute humilité toute l'aide possible pour y arriver et d'accepter d'avance qu'il y aura forcément des erreurs et des dérives parfois douloureuses à corriger. 
Dans notre monde en pleine crise, en pleine mutation, c'est la seule démarche qui aujourd'hui me paraisse authentiquement «de gauche».
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Pour ce qui est de la France, je pense que la démonstration est faite que malgré la bonne impression qu'il faisait au début (y compris à moi), le programme d'Emmanuel Macron n'a rien de nouveau ni de «réaliste»: au pire c'est un assemblage hétéroclite de demi-mesures contradictoires pour faire plaisir à tout le monde — surtout aux banquiers rétro, au mieux la poursuite de la «stratégie du pédalo» de Hollande, dont le dernier quinquennat nous a démontré la valeur. Ce qui est confirmé par la bande de vieux schnocks qui y adhèrent goulûment. 
Par contre, Hamon, qui avait de loin la stratégie la plus innovante et audacieuse, a complètement raté le coche. À regret, j'en conclus que la seule façon de récupérer quelque chose de positif de cette bizarre campagne est que Hamon se rallie à Mélenchon, puisque son rêve de réunir une vraie gauche progressiste et non-sectaire sous le parapluie socialiste s'est avéré un cauchemar. 
Il pourrait obtenir en échange un statut de dauphin (ce qui ne veut rien dire mais conforterait son égo) et l'intégration à la plate-forme «insoumise» de ses meilleures idées, notamment le revenu universel, la prise en compte de la fin du plein emploi d'ici une génération, une 6e République dessinée par les électeurs et une sérieuse rénovation démocratique de l'Union européenne – dont l'orientation ultime (plus ou moins d'Europe) sera définie non par les chefs ou les élites, mais par les citoyens. 
Ce ne sera pas assez pour gagner la présidentielle, mais permettra de former aux législatives un groupe parlementaire significatif et cohérent. Mieux que rien.

12 mars 2017

Avertissement solennel

 à: Gérard Collomb, Bertrand Delanoé, Daniel Cohn-Bendit, Robert Hue, Eric Jalton, François de Rugy, Jean-Louis Touraine, Philippe Saurel, Bernard Kouchner... et tous les autres qui se prétendent de gauche et qui s'allient à Emmanuel Macron

Mesdames et messieurs,
* Considérant que la gauche a un candidat qu'elle a élu, Benoit Hamon, et un autre auto-proclamé, Jean-Luc Mélenchon;
* Considérant que ces deux candidats ont fait la preuve, sur plusieurs décennies et chacun à sa façon, de leur engagement à gauche et de leur volonté de promouvoir le bien du peuple;
* Considérant que ces deux candidats ont des programmes clairement de gauche possédant bon nombre de points communs;
* Considérant que le candidat Emmanuel Macron est un transfuge du parti et du gouvernement socialiste et qu'il se proclame ouvertement «ni de gauche ni de droite»;
* Considérant que le candidat Macron n'a jamais démontré son attachement au bien du peuple, mais a toujours défendu les avantages et privilèges des entreprises et du patronat;
* Considérant que le «programme Macron» est un ensemble flou de propositions «libérales» qui ne constituent en rien un programme de gauche:

Sachez que le fait de déserter les deux candidats progressistes légitimes pour appuyer Emmanuel Macron ne peut être qu'une TRAHISON ENVERS LA GAUCHE et UN REFUS DE LA DÉMOCRATIE.
Rien ne vous justifie de rejeter le choix démocratique de deux millions d'électeurs du peuple de gauche, effectué dans une primaire dont la plupart d'entre vous s'étaient engagés à respecter le résultat.
Rien ne vous justifie de considérer le choix politique comme une simple excursion de shopping dans un vague BHV des idées neuves pour y piger librement celles qui vous plaisent personnellement. La gauche est un engagement envers le peuple, non un caprice individuel.
Rien ne vous justifie de prétendre que votre jugement personnel, souvent influencé par des considérations d'ambition et de vanité, prime sur l'opinion éclairée de plus d'un million de militants de gauche désintéressés.
Rien ne vous autorise à renier vos engagements et votre parole et à souiller votre honneur et le nôtre par opportunisme et par prétention de savoir mieux que le peuple ce qui est bon pour le peuple.
Tenter de mettre sur le même pied les désaccords de MM. Mélenchon et Hamon avec le parti socialiste, l'un de l'extérieur, l'autre à l'interne et tous deux comportant des sacrifices importants dictés par des questions de principes, avec le départ d'Emmanuel Macron de ce parti et de son gouvernement pour des raisons d'égocentrisme et de pure ambition électoraliste, est une honte et un mensonge.
Vous imaginer qu'un Emmanuel Macron, transfuge sans expérience, sans parti, sans véritable organisation, sans programme articulé, financé principalement par le patronat de droite, est une solution «de gauche» pour empêcher une victoire d'une Marine Le Pen aguerrie et appuyée par une solide organisation relève de l'hallucination, non du réalisme politique. Au contraire, tout authentique candidat de la gauche unie qui parviendra au second tour a de sérieuses chances de l'emporter contre tout candidat de droite et particulièrement contre l'extrême-droite.
Votre trahison met en danger la possibilité imprévue qu'a la gauche de reprendre véritablement le pouvoir en France après un intermède malheureusement entaché d'un excès de social-démocratie sans doute sincère mais d'inspiration de centre-droit. Elle est un obstacle majeur à un véritable rapprochement de l'ensemble des forces de gauche pour parvenir à un regroupement à l'élection présidentielle.
Votre trahison a pour effet que les électeurs de gauche ne pourront plus jamais se fier à votre parole et à vos engagements, en particulier lorsque viendra le temps de leur demander d'appuyer vos efforts pour vous faire élire ou réélire. Réfléchissez-y: même sur le plan de vos ambitions personnelles, cette faute majeure de jugement compromet votre avenir et vos espoirs de carrière publique. N'espérez pas que vos électeurs vont l'oublier ou vous le pardonner. D'autres se chargeront, à bon droit, de le leur rappeler. Et votre crédibilité pour vous défendre se retrouvera à zéro.
Pensez que le temps presse pour racheter votre erreur. Vous pouvez encore faire amende honorable, abjurer un engagement néfaste dans un projet qui ne peut d'aucune façon être considéré de gauche, et rallier le camp de ceux qui défendent réellement le bien du peuple et l'avenir du pays. Vous pouvez encore accepter que l'opinion du peuple de gauche a plus de poids et de valeur que votre vanité personnelle. Vous pouvez, vous DEVEZ vous associer à l'ensemble de ceux qui luttent pour un véritable regroupement de la gauche où enfin Jean-Luc Mélenchon, Benoit Hamon et leurs partisans pourront travailler ensemble à la victoire.
Chaque jour qui passe où vous vous obstinez à ne pas voir la vérité en face met encore plus en danger l'avenir de la gauche, l'avenir du pays... et vos propres projets. On ne gagne jamais rien à trahir.
Pensez-y.

Yves Leclerc, simple citoyen de Montpellier