14 mai 2021

Le Monde sous Biden...

C'est clair que le monde où Joe Biden est à la Maison Blanche est plus prévisible que celui de l'ère Trump. Mais plus paisible et plus équitable? Pas sûr. Quelques notes en vrac sur les dernières semaines:

a. La «lune de miel» présidentielle est bien terminée. Les médias grand public, libéraux ou centristes (NY Times, LA Times, Boston Globe, CNN, MSNBC...) ont commencé à chercher au nouveau Président des poux dans la tête – et à en trouver (frontière mexicaine et immigration, salaire minimum, définition des infrastructures...). Bien plus, en passant, que ce que ceux de droite (Fox News, WSJ etc.) ne l'avaient fait pour Trump pendant une grande partie de son mandat; ce qui contredit au moins partiellement l'accusation souvent entendue de parti-pris systématique de la part du «mainstream».

b. À l'intérieur, Biden se montre étonnamment prêt à écouter ceux qui ne pensent pas comme lui, fussent-ils de gauche. Et il ne manque pas d'audace dans ses tentatives de solution aux problèmes, mais sa vision d'ensemble reste marquée par son passé et sa génération.

c. En particulier, Biden est en train de démontrer de façon spectaculaire à quel point des décisions intelligentes et des actions rapides et déterminées pouvaient infléchir le cours désastreux de la pandémie en cours. On peut espérer que d'autres pays en tireront la leçon.

d. En revanche, sa fixation sur le plein emploi est typique d'une mentalité de l'Ère industrielle datant du 19e et 20 siècles, ignorant l'Ère de l'information du 21e. On ne peut que regretter l'absence d'une stratégie innovante combinant Revenu universel garanti et recherche d'une productivité accrue, peu importe son effet sur le niveau d'emploi, mais tenant compte des ajustements sociétaux que cela implique.

e. À l'extérieur, ses politiques sont plus claires et plus constantes que celles de son prédécesseur, mais elles demeurent dans le cadre étroit des stratégies classiques de Washington pour exercer une influence dominante sur ses alliés et nuire à ses adversaires. On n'a notamment aucun indice d'un virage plus pacifiste. Il faudra attendre un Président d'une autre génération (et encore!) pour que se produisent dans ce domaine des changements significatifs, mieux accordés à l'évolution géopolitique récente.

f. Le caractère exemplaire (à tort ou à raison) et quasi-messianique de la démocratie américaine sur le reste du monde a été gravement compromis, alors que son image de volontarisme hégémonique est intacte. Il n'est pas clair que l'action internationale de Biden est à même de corriger la situation, surtout qu'il n'y a plus le même consensus massif dans la classe politique sur l'évangélisme du pays à cet égard. Au contraire, l'exemple des États-Unis sert plutôt désormais de justification pour les excès autocratiques de bon nombre d'autres chefs d'État et gouvernements.