10 avril 2022

Les Leçons d’un scrutin

Le résultat imprévu mais d’une implacable logique du premier tour de l’élection présidentielle française expose une grappe d’absurdités dont il est essentiel qu’on admette l’existence et pour lesquelles il faudra d’urgence que la France (entre autres pays) trouve des solutions.

a) L’écologie ne peut pas être une cause partisane. D’une part, du moins jusqu’à ce qu’il soit trop tard, les partis Verts n’ont aucune chance de prendre le pouvoir et d’imposer leur agenda, si crucial qu’il soit; d’autre part, les autres partis utilisent ce même agenda pour attirer les électeurs… puis en oublient l’essentiel jusqu’au prochain scrutin.

b) La «représentativité» ne représente plus rien, puisque sa formule ne répond plus à la réalité. La structure basée sur une double élite, composée de petits potentats régionaux ou locaux dominant des clientèles captives et d’une clique associée de gouvernement vivant dans une bulle privilégiée dans la capitale, a clairement perdu la confiance des citoyens.

c) Les «partis de gouvernement» n’ont plus ni moteur, ni gouvernail. Ou bien, comme en France et en Italie ils sont incapables de motiver leurs clientèles et ne sont même plus présents au dernier tour des élections nationales, ou alors ils deviennent la proie consentante de meneurs populistes d’extrême-droite comme aux USA et au Brésil.

d) Les gauches ne sont plus les partis du peuple mais des chapelles d’élite vivant à l’écart du monde travailleur. Elles ont oublié leurs principes de base et se rabattent sur des causes parfois valables mais qui ont peu à voir avec les vrais problèmes de leur véritable clientèle, qu’elles poussent ainsi dans les bras de leurs pires ennemis.

En conséquence, un régime politique fondé sur l’élection de députés ou représentants groupés en formations politiques organisées soit idéologiques, soit opportunistes mais détenant tout le pouvoir politique, ne répond plus aux besoins ni aux aspirations de la masse des citoyens. Ses carences sont trop graves et trop fondamentales pour qu’on puisse les corriger par des réformes partielles. Le passage à une démocratie qui remet directement les leviers de l’État aux mains du peuple n’est plus une utopie ni un rêve irréalisable, mais une nécessité pressante pour faire face aux problèmes inédits et profonds que pose le 21e siècle: santé de la planète et de ses habitants, répartition acceptable de la richesse commune, gestion de la main d’oeuvre et de l’emploi, maîtrise des effets positifs et négatifs des progrès imprévisibles des technologies de l’information, migrations de populations hétéroclites sous le double effet des inégalités économiques et des conflits socio-politiques souvent sanglants.

Si les progressistes, en particulier européens, refusent de prendre en compte ces évidences dévoilées par un scrutin au résultat d’une clarté exemplaire, ils se préparent des futurs tragiques.