25 avril 2017

Contre qui ou quoi voter?

Emmanuel Macron affirme haut et fort qu'il veut qu'on vote «pour lui et pour son projet», non contre Marine Le Pen. Je respecterai rigoureusement son voeu, je ne voterai pas contre Marine Le Pen, je voterai sur la base d'un projet. Mais je ne voterai pas pour le projet d'Emmanuel Macron, dans lequel je ne me reconnais en rien. 
Dans mon cas, et dans le cas de millions de gens qui souhaitent un vrai changement, non un retour encore plus agressif vers un libéralisme qu'il présente en France comme une innovation mais qui est plutôt une vieille recette des années 1980 en fin de course dans la plus grande partie du monde, il n'en est pas question. 
Dans mon cas et dans celui de millions de gens qui croient que l'avenir de la planète et de ses habitants est plus important que celui des banques et des grandes entreprises prédatrices et qu'il y a une différence fondamentale entre les deux, il n'en est pas question. 
Dans mon cas et dans celui de millions de gens qui comprennent que face au double défi de l'écologie et de l'automatisation du travail, le plein emploi n'est qu'un dangereux miroir aux alouettes et qu'il faut s'attaquer en priorité à la tâche colossale de faire vivre dignement une forte minorité ou même une majorité de chômeurs permanents, il n'en est pas question. 
Dans mon cas et dans celui de millions de gens qui croient que le citoyen d'aujourd'hui, instruit et informé, est capable de choisir son propre destin sans qu'il lui soit dicté par les «consignes de vote» d'une élite prétentieuse et anachronique, il n'en est pas question. 
Dans mon cas et dans celui de millions de gens qui croient que l'Europe dictatoriale et fonctionnarisée telle que la conçoivent Emmanuel Macron et Angela Merkel court à sa perte, il n'en est pas question.
Je voterai blanc et je soupçonne que nous serons des millions à le faire.

Yves Leclerc

24 avril 2017

Le bébé avec l'eau du bain?

Une chose m'inquiète dans cette folle frénésie du tout-sauf-Marine universel et bien pensant. C'est très joli de charger Mme Le Pen de tous les péchés d'Israël (sans compter Attila, Hitler, Daech et quelques autres), mais on ne va pas me faire croire que l'électorat FN est entièrement composé de 7 millions et plus de racistes xénophobes anti-européens bouchés par les deux bouts. Holà. 
On est en train d'évacuer presto les préoccupations, les peurs, les inquiétudes souvent compréhensibles et justifiées d'une masse importante de gens qui, même s'ils font fausse route, sont des citoyens français et européens parfaitement légitimes et, par la même occasion, on jette par-dessus bord tout effort pour les comprendre et tenter d'y répondre. 
Les solutions des frontistes ne tiennent pas la route c'est vrai; mais de l'autre côté, tout le programme de Macron est construit pour plaire aux banquiers et aux boursicoteurs tout en somniférisant les classes moyennes et en séduisant les intellectuels par ses tours de passe-passe idéologiques et son vocabulaire à saveur techno pseudo-innovant. 
Rien là-dedans pour les ouvriers, les retraités pauvres, les intérimaires, les chômeurs de longue durée – sauf la dangereuse illusion d'un retour du plein emploi. Rien sur la collision imminente entre écologie et technologies et leur effet probablement dramatique sur la main d'oeuvre, rien sur le cul-de-sac où s'enfonce l'Europe de l'après-brexit. Rien que des certitudes arrogantes vêtues en habit de soirée; pas le moindre questionnement, la moindre incertitude, rien que la prétentieuse assurance que la seule solution est une dose encore plus forte et indigeste de ce qui n'a pas marché depuis dix ans, une sorte d'hyper-hollandisme pimenté d'un peu de sarkozysme servi «à la moderne». 
Et on voudrait que je m'en réjouisse et que je me joigne au choeur de louanges? Non merci.