20 août 2021

De Kaboul à Washington

À mesure que la tragédie afghane s’enfonce dans une morbide absurdité, certains constats très simples émergent:

a) Toute défaite est désordonnée. Et plus elle est subite et complète, plus l’est aussi le désordre. Donc, ce qui se produit ne devrait rien avoir de surprenant.

b) Concentrer le problème de l’évacuation en un seul lieu et une seule formule ne peut qu’empirer les choses. Diviser un problème complexe en «bouchées» distinctes à digérer séparément est un élément indispensable à toute solution. Pakistanais et Indiens, notamment, regroupent leurs ressortissants en plusieurs lieux, et utilisent aussi bien les chemins de fer, les camions et les autobus que les avions et les hélicos pour les ramener chez eux; on dirait que ça marche mieux.

c) Attendre au dernier moment pour prendre des mesures qu’il aurait été beaucoup plus simple, économique et efficace de mettre en marche longtemps auparavant est une recette pour le désastre. La procrastination à ce point ne fait pas perdre seulement la face, mais tout le reste.

d) La réaction instinctive des Américains pour tout faire eux-mêmes sans consulter personne, jusqu’à ce qu’ils en constatent l’impossibilité, montre la limite de leur prétendue efficacité. 

e) Quand l’absence de prévision s’étend au fait de ne même pas savoir quoi faire des gens qu’on est en train de «sauver», la limite de l’irresponsabilité est atteinte.

f) Se placer en position de devoir faire appel à un vainqueur qu’on n’a cessé de traiter de moins que rien pour aider à l’évacuation des vaincus est une formule garantie d’humiliation. On ne peut reprocher aux Taliban d’en profiter.

g) Il est invraisemblable que 75 000 combattants irréguliers puissent conquérir aussi rapidement un pays de près de 40 millions d’habitants. Il faut absolument comprendre comment et pourquoi c’est arrivé.

h) La crise afghane montre que l’épisode Trump n’était pas une rupture dans l’évolution de la pensée américaine, mais seulement une déviation plus effrontée. Hélas.

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