16 décembre 2016

Alep, qui blâmer?

Nous tous. Depuis février 2011, je m'entête à crier une vérité qui crève les yeux et qu'on ne veut pas voir, mais qui vaut aussi bien en Syrie qu'en Libye, en Grèce, au Congo ou aux USA: nous entrons dans une phase de l'Histoire où la lutte n'est plus seulement entre gauche et droite, prolétariat et patronat, socialisme et capitalisme, Sud et Nord, mais bien plus simplement et plus brutalement entre citoyens et pouvoirs. Tous les pouvoirs, qu'ils soient politiques, financiers, religieux, sociaux. Progressistes, conservateurs, réactionnaires ou entre-deux-chaises. Et tous les citoyens, qu'ils soient Podemos, Cinque Stelle, Front National (hé oui, va falloir un jour le dire), Indignados, Wall Street Occupiers, Carrés Rouges, Nuit Debout ou sans nom et sans étiquette. Peut-être même Daech, à l'extrême-limite? 
Face à une flagrante trahison des «élites», tous ces mouvements, même ceux qui semblent racistes, passéistes, anti-immigrants, nationaleux, ont fondamentalement RAISON de s'insurger. Plutôt que de faire entre eux des distinctions désuètes, il faut écouter derrière les revendications parfois illogiques et fourvoyées leur détresse profonde face à un monde qui se fait sans eux et contre eux. C'est sur cette base qu'il va falloir se mettre à réfléchir et à réagir... sinon nous courons à une catastrophe que (je n'ose quand même pas dire heureusement, mais je le pense parfois malgré moi) je ne verrai sans doute pas.
J'ajouterais à ce qui précède l'analyse que faisait Yanis Varoufakis au lendemain de l'élection de Donald Trump il y a un mois (https://theconversation.com/trump-victory-comes-with-a-silver-lining-for-the-worlds-progressives-68523). Je la trouve éclairante mais incomplète parce qu'elle sous-estime l'importance de la dimension politique et sociale de ce qui se passe. Il a raison de dire que les solutions libérales sont dépassées, mais il ne voit pas que les populismes nationalistes même d'extrême-droite sont issus du même désarroi que ceux de gauche. 
Il faut rejeter leurs idées mais pas leurs angoisses et s'approcher de leurs adhérents pour leur montrer que nos problèmes sont tous les mêmes: la seule façon d'atteindre une masse critique de réformateurs est de leur faire voir que leurs préjugés et leurs solutions réactionnaires ne font qu'aggraver le mal et que ce sont des formules progressistes de solidarité et de coopération, non de repli sur soi, qui offrent la seule issue réaliste à la crise. Podemos, en Espagne, avait bien démarré dans cette direction, mais j'ai l'impression qu'ils se sont égarés (temporairement? Je l'espère) dans des jeux de pouvoirs et de personnalités...

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