12 août 2024

Réflexion constitutionnelle

Les récentes secousses politiques dans divers pays, notamment en France et aux États-Unis, m’ont incité à réfléchir sur le rôle joué dans nos régimes par les Constitutions, et en particulier par leurs processus d’amendement. D’où ce qui suit.

Les Constitutions nationales varient énormément par la structure, la forme et le contenu, mais leur rôle est toujours le même: fixer les règles qui définissent les relations entre un État et ses citoyens. À cet effet, elles comprennent normalement quatre composantes, parfois distinctes, plus souvent regroupées et amalgamées de façons assez confuses:

  1. Principes fondamentaux. Par exemple: séparation des pouvoirs législatif, exécutif, juridique et informationnel, laïcité des institutions ou religion d’État, «la vie, la liberté et la poursuite du bonheur» aux États-Unis, «liberté, égalité, fraternité» en France…
  2. Structure et organes de l’État. Gouvernement unitaire ou fédération (incluant le partage des pouvoirs entre les niveaux), statut et pouvoirs du chef d’État, régime parlementaire, définition, pouvoirs et obligations des principaux ministères, de la sécurité intérieure et extérieure, des agences gouvernementales, etc.
  3. Droits et devoirs des citoyens: Charte des droits, droit et obligation de vote, service civique ou militaire, sécurité sociale et santé, éducation publique, respect du bien commun et solidarité, organes de la société civile, etc.
  4. Adaptation à des circonstances particulières et à l’évolution des mentalités: orientations sociales, économiques et morales, statut et traitement des non-citoyens, des aînés, droit du travail, droits de reproduction, port d’armes, vie privée et transparence, symboles religieux, etc. 

Le premier élément devrait avoir un caractère permanent; des amendements n’y sont justifiés que dans un contexte d’extrême nécessité et avec l’accord quasi unanime des citoyens.

Le second et le troisième doivent aussi avoir un caractère durable, mais prévoir un mécanisme formel de modification et de perfectionnement en cas de besoin réel, exigeant un fort consensus des institutions et des citoyens.

Le quatrième doit non seulement être modifiable, mais devrait être sujet à des mises à jour périodiques et obligatoires (une fois par décennie, par génération…), selon un processus transparent et démocratique. 

Le «principe» universellement respecté, selon lequel toute modification constitutionnelle doit être soumise aux mêmes règles d’amendement, est clairement nuisible: il n’offre en pratique qu’une alternative entre immobilisme quasi total et changement cataclysmique. On en voit clairement l’effet pervers, entre autres dans les trois Constitutions pourtant très différentes que j’ai personnellement étudiées: celles du Canada, de la France et des États-Unis.

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