21 janvier 2015

Ciao, grand cousin

Je pleure le départ de mon «grand cousin» Claude Aubin, décédé dans son sommeil hier à 89 ans. Il a d'abord été l'idole de ma jeunesse, élégant universitaire globe-trotter poursuivant des études à l'étranger, notamment au Brésil... et roulant dans les rues de Québec à bord de la première mythique Mercedes 300 «gullwing» que nous ayons jamais vue. 
 Sa carrière subséquente à l'Alcan l'a mené de la direction d'une mine au Katanga (d'où il a dû filer en douce au moment de la révolution congolaise) à des missions un peu partout à travers la planète pour se terminer à l'usine-mère d'Arvida. 
 Son hobby était d'apprendre les langues, dont il parlait à la perfection une demi-douzaine outre le français et l'anglais. Une fois à la retraite, et quoique fédéraliste irréductible, il a d'ailleurs été choisi par René Lévesque pour diriger et remettre en ordre l'Office de la Langue française. 
 C'est dans ce rôle que je l'ai retrouvé vers 1983... à Lisbonne à l'occasion d'une Biennale de la Francophonie. Il avait d'abord sauvé la face de l'organisation en étant le seul dignitaire étranger capable de répondre dans la langue de Camoëns au ministre portugais de la Culture, qui nous avait accueillis dans un français élégant pratiquement sans accent.
 Nous avions ensuite effectué une délicieuse virée d'un week-end en Algarve en compagnie du merveilleux essayiste et syndicaliste Pierre Vadeboncoeur. Je n'oublierai jamais un repas communal animé dans une taverne de pêcheurs de Portimao, tous assis sur des bancs le long d'une table de bois rustique où trônaient, au milieu des longs cols des fioles de vinho verde et des bières Sagres trappues, des marmites pleines de beaux et savoureux crabes rouges et de légumes odorants. Vadeboncoeur avait entrepris une vigoureuse discussion avec un des dirigeants du syndicat des marins locaux, et mon cher cousin, bon Canadien plutôt conservateur, s'est trouvé dans l'obligation insolite de traduire un chaud débat entre un socialiste québécois et un communiste portugais – ce dont il s'est tiré avec un brio souriant! 
 Jusque dans les années 2010, Claude continuait d'aller skier chaque hiver dans les Alpes. Lui et son épouse Cécile, directrice d'un programme culturel à l'U. de M., nous ont reçus à plusieurs reprises au cours des ans dans leur jolie maison à colombages de Ville Mont-Royal, avec la chaude et abondante hospitalité du Lac Saint-Jean dont elle est native. 
Claude en arrière au centre et Cécile à droite
Il y a deux ans, c'était pour un Noël particulièrement enneigé, où la fête s'est en partie déroulée dans la magie d'un jardin d'hiver qu'ils avaient érigé au coeur de leur arrière-cour alors toute blanche! 
 Nous avions pour amis communs Johanne et Henri Heusdens, personnage incontournable du night-life montréalais, ex-patron des discothèques Chez Zouzou des années 60-70 puis H. Henri Club des années 80-90 — où se retrouvaient souvent les joueurs du Canadien après une partie. Avec eux, nous avions aussi célébré par un souper-spectacle dans un piano-bar de la rue Crescent leur prochain départ ensemble pour le Mexique, où ils passaient une partie de l'hiver. Que de beaux souvenirs! 
Ciao, Claude!

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