En souvenir de l’amie de très longue date Sonia del Rio, née Boisvenu en Abitibi, justement célèbre en Espagne comme gran bailaora du flamenco et à Montréal comme patronne du charmant bar à musique et poésie La Chaconne dans le Quartier-Latin, qui est décédée volontairement au CHUM pour cause de grandes souffrances le 13 octobre 2023.
Nous nous étions connus dans notre folle jeunesse au bar El Cortijo de Tex Lecor (rue Clarke), et nous sommes revus à diverses reprises avec toujours autant de plaisir au cours des décennies suivantes en Espagne, en France et au Québec. À la fin octobre 2022, octogénaire encore en grande forme, elle s’était jointe à moi avec son mari Claude Normand et mes neveux pour m’aider à fêter mon premier nostalgique anniversaire après le récent décès de ma chère Marie-José; nous avions assisté à la Place des Arts au spectacle de danse du brillant jeune gitan Farruquito… que Sonia et moi avions ensuite rencontré en coulisses, par faveur spéciale due à sa réputation et au fait qu’elle avait fait jadis partie avec son grand-père Farruco de la troupe de José Greco. Ils ont même esquissé ensemble des pas de flamenco!
Le 13 octobre dernier, Claude a tenu dans leur appartement sur les pentes du Mont-Royal un dîner-souvenir émouvant dont il m’a demandé de rappeler les détails… ce que jusqu’ici je n’avais pas eu l’énergie ni le temps de faire, coincé entre des problèmes personnels de santé et des trous de mémoire imprévus. J’essaie de me racheter, imparfaitement et tardivement.
Au menu, Claude avait lui-même concocté d’abord un beau gazpacho traditionnel froid avec ses garnitures hachées de poivron, oignon, tomates… suivi d’une classique paëlla valencienne abondante et goûteuse au poulet et fruits de mer, bien parfumée au safran et accompagnée de vins du rioja. Pure jouissance.
Nous n’étions que six – les proches de Sonia et nos amis Pomerleau ayant dû se décommander au dernier moment – avec le peintre Jacques Léveillé, sa pétillante Marylin et le couple Sylvie et Yvon Descormier; mais la qualité compensait le petit nombre, dans le décor chargé de souvenirs de Sonia et ouvert sur le panorama d’un bel après-midi d’automne sur le centre-ville. La conversation vagabondait agréablement entre les souvenirs que chacun avait de la disparue, notre commune passion des voyages et des belles rencontres imprévues, nos découvertes en littérature et en musique, et des commentaires souvent ironiques sur l’actualité – notamment sur la fin de la campagne électorale américaine, où Léveillé a fait preuve d’un remarquable perspicacité. Le crépuscule commençait à pointer lorsque nous nous sommes quittés à regret.
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