22 octobre 2010

Les bonnes surprises de Bucarest

(15 octobre 2010) Nous avons terminé le séjour à Montpellier par un solide couscous avec les Chantefort chez le gentil Marocain installé du côté d'Odysseum. Le beau temps s'est prolongé jusqu'à la veille de notre départ, seulement interrompu par une bordée de sérieux orages le dernier week-end.

On ne peut pas en dire autant du climat social, qui se gâte sérieusement en France, à cause en particulier du projet Sarkozy de loi sur les retraites. Pas une semaine sans une ou plusieurs grèves, plutôt bien suivies par les syndiqués, avec l'appui tacite d'une majorité croissante de la population.
C'est d'ailleurs ce qui nous a obligés à avancer d'une journée notre départ pour Bucarest, le mardi 12 octobre étant jour de grève, notamment dans les transports. Nous nous sommes donc mis en route le 11, ce qui a occasionné quelques désagréments.
En premier lieu, je n'avais pas remarqué qu'en modifiant notre date de départ, nous nous retrouvions pour la première étape sur un avion Montpellier-Orly, alors que le Paris-Budapest, lui, partait de Charles-de-Gaulle. Nous avons donc dû récupérer les valises, sauter dans un taxi pour Roissy, où il a fallu refaire l'enregistrement, la traversée des barrières de sécurité, la vérification des passeports, etc. Un lunch rapide mais fort bon à la nouvelle succursale de la Brasserie Flo à CDG-2 nous a en partie consolés.
Arrivés à l'aéroport de Bucarest à la tombée de la nuit, nous avons vainement attendu la voiture qui devait nous amener à l'hôtel. Un cafouillage dans les réservations: la voiture était prévue pour le lendemain, alors qu'on avait bien corrigé la date d'arrivée pour la chambre d'hôtel. Résultat, une heure et demie à faire le pied de grue à Henri Coana, qui n'est pas l'aérogare la plus hospitalière au monde, il s'en faut.
Heureusement, le Marriott Grand de Bucarest est un vrai palace, sans doute récupéré par la chaîne américaine d'un ancien hôtel d'État destiné aux dignitaires étrangers. Chambre immense, service impeccable et personnel non seulement stylé et compétent, mais étonnamment chaleureux.
Le lendemain, le concierge du Marriott nous a envoyés luncher dans une extraordinaire auberge du 18e transformée en un restaurant un peu touriste, mais d'une grande élégance, au pied d'un des nombreux monastères qui parsèment la ville. Repas marqué par une extraordinaire bouteille de rouge roumain millésimé 1998 dont, hélas, je n'ai pas retenu le nom.
Deux des directrices de croisière de Tauck (la société avec laquelle nous nous embarquons) parlent français, au grand plaisir d'Azur. L'une d'elle, l'américano-roumaine Lidia, nous a déniché une guide-chauffeure pour nous emmener visiter Bucarest le jour suivant.
Nicoleta est une jeune femme charmante et érudite, mais sa Dacia rouge s'avère un peu "étrète" pour nos corpulences. Voyant cela, elle conscrit son conjoint Georg, qui vient nous cueillir tous les trois dans sa beaucoup plus spacieuse Volks gris fer.
Nous passons donc toute la journée avec ce couple sympathique, à vagabonder sans plan défini dans une ville bien plus attirante que nous ne nous y attendions. Hauts-lieux de la tournée: la "Colline du Patriarche", le minuscule mais splendide monastère Stavropoleos, les centaines de bijoux d'or du Trésor des Daces au Musée d'Histoire, et surtout l'incroyable "Musée du Village", où un ethnologue fou (ou génial) a fait transplanter, dans les années 1930, trois cents maisons, églises, moulins et granges (certains bicentenaires) typiques de toutes les régions de la Roumanie. Le tout égrené sur un site aux allures de jardin campagnard, le long d'un lac bordé de roseaux dans un des immenses parcs municipaux de cette capitale très "verte".
Promenade interrompue par un excellent repas que nous partageons avec Nicoleta et Georg dans la brasserie la plus spectaculaire qu'il m'ait été donné de fréquenter, Caru cu Bere (la charrette à bière), en plein coeur du quartier moyen-âgeux de Bucarest. Le clou de l'événement a été de voir Marie-José se colleter avec la spécialité de la maison, un monstrueux jarret de porc au four qui devait peser son kilo et plus. Sans compter le chou bouilli et la montagne de succulente polenta qui venaient avec. Même si Georg lui a donné un coup de main vers la fin, il en restait assez pour faire découper le reste en trois "doggy-bags" de bonne taille, que Nicoleta a eu la bonne
pensée d'offrir à une famille de SDF rencontrés quelques minutes plus tard sur l'avenue.
Hier matin, trop tôt pour
cette lève-tard d'Azur, nous sommes montés dans un car qui nous a fait faire un rapide tour de la ville, avec un arrêt à l'Atheneum (salle de concert) et un second au
Palais Parlementaire, gigantesque gâteau de noces élevé à la gloire des Ceaucescu dans les années 1980. Les quelque 200 marches à gravir et redescendre pour visiter quelques-uns des 2000 salles et salons de ce dernier ont eu sur nous un effet dissuasif. Heureusement, il y a au rez-de-chaussée un joli Musée du costume qui nous a permis de passer le temps en attendant nos co-voyageurs plus énergiques.
Encore un lunch dans un restaurant typique, Jaristea, décoration splendide fourmillant de curieuses antiquités, notamment une collection d'horloges anciennes et un gramophone RCA à pavillon et manivelle, mais menu de groupe plutôt décevant.
Rien à dire du trajet vers le delta du Danube, que nous avons hélas traversé sur une autoroute anonyme qui en évitait tous les accidents intéressants. Champs en friche et postes d'essence. Embarquement sans histoire à Cernacova sur notre bateau de croisière, le Swiss Sapphire, une sorte de péniche géante construite et aménagée spécialement pour la navigation fluviale.
La décoration et les aménagements sont luxueux, avec un immense bar à l'avant, une grande salle à dîner au-dessous, un autre bar-bistrot à l'arrière et un gigantesque pont-promenade avec jaccuzzi et transats par-dessus tout ça. Notre cabine est grande (30 mètres carrés) et confortable, mais manque un peu d'espaces de rangement. Bof, on se débrouillera.
À notre surprise, la quasi-totalité des 90 passagers sont américains, près de la moitié californiens, et en grande majorité âgés. Un couple d'Espagnols (lui ressemble à Juan Carlos en plus jeune) et nous sommes les seuls "étrangers" à bord… à part le personnel et l'équipage, composés en grande partie d'Européens centraux.
Le capitaine Josef, viennois, nous accueille dans un anglais à l'accent allemand pratiquement incompréhensible, mais avec une bonne humeur communicative. Heureusement, ses explications techniques sont immédiatement reprises en long et en large par Steve, le jeune "tour director" canadien.
À peine la réception de bienvenue terminée et le troupeau des passagers descendu à la salle à dîner, le navire appareille sans bruit et sans secousses pour sa première escale, Ruse (ou Roussé), en Bulgarie.

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