28 août 2007

Paris-Copenhague

(2/08/2007) Nous passons à Paris trois jours d'autant plus agréables que nous y avons découvert un petit hôtel qui mérite le prix du charme douillet: le Garden Élysée, niché au fond d'une cour sur une petite rue près de l'avenue Kléber. Grande chambre très claire donnant sur un jardin fleuri, personnel aux petits soins pour nous, petit-déj. délicieux. Pas de resto, mais il y en a une pelletée de bons dans le quartier et le service aux chambres est excellent. Pas donné, mais vaut son pesant d'euros.
À Charles-de-Gaulle, une surprise pas très drôle: notre avion vers Copenhague est « surbooké »; à la demande du personnel d'Air France, nous nous résignons à céder notre place à une famille qui doit rentrer d'urgence en Scandinavie. En échange, on nous loge dans un Holiday Inn Express qui est l'exacte antithèse de notre hôtel parisien: purement fonctionnel et d'un confort tout juste acceptable, mais bétonné mur à mur et sans le moindre atome de charme. Avantage non négligeable cependant, on modifie aussi nos billets pour nous permettre de rentrer plus tard en France après la croisière si nous le souhaitons.
Copenhague est tout gris et pas très chaud quand nous arrivons le lendemain en milieu d'après-midi. Notre hôtel (Kong Frederick) est très bien situé, à deux pas de la Place de l'hôtel de ville (Radhuspladsen), et fort élégant. C'est un immeuble du début du siècle dernier, qui a été rénové en respectant le style de l'époque. Mais la chambre est un peu étroite, les rangements bizarroïdes, et le service plutôt minimal, quoique généralement sympa.
Nous allons faire un tour en ville, et notre première impression est, disons, mitigée. Nous entrons dans un resto style pub au début de Stroget, la grande rue commerciale piétonne, et nous faisons arnaquer joyeusement: c'est une « trappe à touristes » de la plus belle eau, le service est au mieux grognon, la boisson juste passable et la bouffe mérite amplement que nous la laissions croupir dans l'assiette après deux bouchées. Le tout à des prix dignes du Grand Véfour. En sortant, nous nous retrouvons dans le crachin, au milieu d'une bousculade de touristes surtout germaniques, anglais et polonais, tout le long de l'avenue. C'est ça, Copenhague?
Heureusement, ce n'est pas que ça. Dès le petit déjeûner du lendemain, nous faisons une découverte gastronomique majeure: la cuisine danoise n'est peut-être pas géniale, mais Copenhague doit offrir les meilleurs pains au monde! Oui, Paris et Lyon inclus. La corbeille qu'on nous offre contient non seulement une fort bonne baguette, mais des pains de campagne blanc, parfumé au fromage et de blé entier, un pain noir aux grains de carvi, des pains de seigle, et d'autres aux ingrédients plus mystérieux, qui vous transportent au 7e ciel, surtout lorsque servis chauds avec une touche de délicieux beurre local. Azur décrète même qu'elle ne saurait vivre ici, car Dieu sait combien de kilos en plus elle se collerait! D'autant plus que partout où nous irons, du plus petit café au plus grand restaurant, le pain sera toujours aussi délicieux.
Sur la grand-place, se tient (tenez-vous bien!) le Mondial de football des SDF, mettant en lice des concurrents de 48 pays. On a dressé des estrades de part et d'autre d'un terrain de jeu entouré de palisades, à la manière d'une patinoire de hockey, et des équipes hétéroclites – incluant à l'occasion des filles et des vieillards barbus aussi bien que des gamins de 12-14 ans – d'une demi-douzaine de joueurs sy ébattent dans une bonne humeur qui n'exclut pas une âpre compétition. L'ambiance est d'autant plus colorée que tout autour campent des dizaines de plus ou moins clochards venus de tous les coins de l'Europe assister à « leur » Mondial. Nous y passons avec grand amusement une bonne heure et plus.
Puis nous nous armons d'une carte de transports en commun (10 passages pour une vingtaine d'euros) et descendons jusqu'à la seconde grande place, la Kongens Nytorv. Là, déjeûner dans un resto agréable installé dans une vieille cour et servant (si l'on peut s'exprimer ainsi, le personnel étant débordé au point d'être totalement inefficace) un très bon homard – canadien! – au beurre à l'ail.
Ensuite, embarquement sur un bateau-mouche qui parcourt le pittoresque Nyhavn (le "nouveau" port à peu près aussi nouveau que le Pont Neuf est neuf), fait ensuite le tour du port marchand, curieusement bordé d'une vingtaine d'éoliennes géantes ancrées en pleine mer, puis s'engage dans les multiples canaux qui sillonnent la ville – construite, comme tout le monde le sait n'est-ce-pas? sur une collection d'îles. Malheureusement, ça se termine sous une douche aussi soudaine que brutale, alors que nous nous trouvons en plein milieu d'un canal, à l'écart de tout embarcadère. À la première occasion, nous débarquons trempés des pieds à la tête et, après une halte dans une pâtisserie encombrée d'autres réfugiés, réussissons à arrêter un taxi qui nous ramène au Kong Frederick. La leçon: comment distingue-t-on le vrai Copenhagois du touriste? C'est celui qui porte un parapluie même au grand soleil.
La capitale danoise n'est pas une séductrice, mais une discrète. Elle ne vient pas vous chercher, préfère qu'on prenne la peine de la découvrir et de l'apprivoiser. À ce titre, son emblématique « Petite Sirène » la représente parfaitement: on s'attend à un monument important dans un site prestigieux, il faut presque la chercher pour la découvrir, modeste et le dos à demi tourné au spectateur, assise sur un vulgaire caillou à l'entrée du port. Décevant? Au premier abord, certes... mais plutôt émouvant une fois qu'on en a compris le sens.
Au fond, ville prospère et sans complexes, Copenhague n'a que faire des touristes, qu'elle accueille poliment, mais sans faire le moindre geste pour s'adapter à eux. Au contraire, elle fait clairement entendre que c'est à nous, étrangers, à nous ajuster à a ses habitudes et à ses lubies, un effort qui sera, il est vrai, amplement récompensé. Par exemple par l'escalade des sept tours et demi de la rampe en spirale de sa Rundetarn (tour ronde), au milieu de laquelle je découvre une magnifique exposition de tapisseries (photo) et au sommet de laquelle la vue sur la ville est rien moins que spectaculaire. Sans oublier le célèbre parc d'attractions Tivoli, dont nous n'attendions pas grand-chose, mais dont l'élégance fleurie et le caractère relax nous ont ramenés en enfance comme n'aurait jamais su le faire un spectaculaire et ultracommercial Disneyland.
À force de circuler dans tous les quartiers en utilisant son pratique système de tranport en commun, de déambuler à pied dans les multiples voies piétonnières du centre, de prendre l'air dans un de ses nombreux parcs, de flâner et de nous arrêter le temps d'une bière ou d'un café sur une de ses fréquentes et jolies places, nous tombons graduellement sous le charme. Si bien qu'au bout de cinq jours, c'est presque à regret que nous refaisons nos valises pour nous embarquer sur le Seabourn Pride, le bateau de croisière qui nous attend à un quai tout près du centre-ville.

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