24 février 2016

Qui perd gagne?

«Nous interrompons momentanément ce récit de voyage pour... non pas une publicité, mais une brève réflexion politique» que je ne puis m'empêcher d'intercaler entre Buenos Aires et Saõ Paulo.
Une chose me frappe dans la bizarre campagne électorale américaine. C'est la parfaite symétrie dans les contraires qui pousse les deux grands partis à choisir celui de leurs candidats qui a le moins de chance de gagner la présidentielle en novembre.
Chez les Républicains, il y a une course échevelée et parfois brutalement agressive entre un vaste peloton de prétendants; chez les Démocrates, une lutte à deux plutôt prévisible et essentiellement courtoise. 
Chez les Républicains, le favori est d'une extrême-droite primaire et sectaire et fait face à une violente opposition de la direction du parti; chez les Démocrates, la favorite est d'un centre-gauche modéré au point d'en être indétectable et possède l'appui total de son establishment. 
L'un et l'autre peuvent compter sur l'adhésion de la masse des militants de leur camp, mais font des scores désastreux parmi l'électorat indépendant — qui est clairement celui qui va déterminer le résultat final. 
Les candidats qui font le mieux à cet égard sont, pour les Républicains, un modéré de centre-droit aux idées changeantes et imprécises, pour les Démocrates un extrémiste de gauche aux opinions tranchées. Mais aucun des deux, à moins d'un revirement pour l'instant imprévisible, n'a de chance sérieuse d'obtenir l'investiture de son parti (alors qu'ils seraient les mieux placés pour l'emporter à l'élection même), l'un par la faute des militants, l'autre par celle de l'appareil.
Ce paradoxe quasi suicidaire devrait être un sujet de réflexion pour ceux qui, notamment en Europe, voient le système américain comme un modèle de ce que devrait être la démocratie, en particulier l'institution des primaires qui, de fait, est largement responsable de la situation.

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