16 juin 2016

Brexit en vue?

Je suis étonné et un peu inquiet de constater le peu d'attention que le monde accorde à ce qui devrait pourtant être le sujet numéro un d'intérêt immédiat sur la scène internationale et surtout européenne: la possibilité soudain très réelle d'une rupture entre le Royaume-Uni et l'Union européenne.
La chose n'est sans doute pas aussi spectaculaire que le massacre d'Orlando ou les naufrages de réfugiés en Méditerranée, mais elle pourrait avoir des conséquences autrement dramatiques à moyen terme non seulement pour les pays de l'UE, mais pour l'équilibre mondial dans son ensemble.
Après une longue période où on pouvait la croire peu vraisemblable, l'éventualité d'un «Brexit» devient une probabilité. La quasi-totalité des sondages d'opinion anglais des deux dernières semaines ont donné le NON à l'Europe d'abord à égalité, puis de plus en plus majoritaire, en même temps que diminue le nombre des indécis. Habituellement, ce genre de configuration indique une dynamique forte qui non seulement finit par être irréversible, mais tend à s'accentuer, surtout si elle se produit dans les derniers jours d'une campagne. En d'autres mots, le 47-48 contre 42 d'aujourd'hui pourrait bien devenir un 55 contre 45 au moment du référendum du 23 juin (soit le même écart qu'il y a dix ans en France contre la Constitution européenne).
Pourquoi personne, en-dehors de l'Angleterre même, ne semble-t-il s'y intéresser? Pourtant, lors de la crise grecque de l'été dernier, le débat sur les conséquences probables d'un «Grexit» était bruyant, universel et acerbe... Or il faut quand même admettre que la Grèce n'est dans l'Europe qu'un joueur politique et économique marginal, alors que l'Angleterre est depuis des siècles un des trois axes majeurs de l'évolution du continent avec l'Allemagne et la France, et que Londres est de loin son centre économique le plus important. Ce qui aurait été une secousse grecque ennuyeuse mais non mortelle serait plutôt un séisme catastrophique venant du Royaume-Uni.
L'hypothèse avec laquelle je jongle en réponse est que la classe dirigeante européenne et mondiale juge qu'elle n'a pas lieu de s'inquiéter, parce que le gouvernement britannique l'a déjà avisée qu'il comptait faire comme Paris la dernière fois et ne pas tenir compte du résultat du vote démocratique, quel qu'il soit. Sauf que je doute que la tradition politique anglaise, bien moins «régalienne» que la française, lui permette de le faire sans provoquer un soulèvement citoyen majeur.

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