Les peuples (encore plus les couples) heureux n’ayant pas d’histoires, je ne vois pas pourquoi je me serais cassé la tête ces derniers temps à vous en raconter. Ce qui me fait une bonne excuse pour ces bientôt trois mois de silence dans les aventures des “Bums chromés”, non? Mais si nous reprenons le cours du récit, ce n’est pas que le malheur ait frappé. Il y a toujours l’interminable glissade boursière et économique qui nous chagrine un peu, mais comparé aux amis-clients de Bernie Madoff, nous n’avons pas trop à nous plaindre. Et comme dirait l’autre, c’est rien que de l’argent, après tout. En vérité, c’est le retour à bord du Bum en fin de semaine qui est à la source de cette enfiévrée littéraire. Et la nuit tombant vite sous les tropiques, et le câble télé ayant été pété par un coup de vent malencontreux, quoi faire d’autre de nos soirées que de s’installer sur le cockpit face à l’écran pour clavarder, tout en profitant d’un agréable souffle d’alizé? Je reviens d’abord quelques pas en arrière pour mettre fin à notre chapitre barcelonais par une péripétie aussi amusante qu’imprévue. Alors que toutes les supplications, les tempêtes et les menaces auprès de la SNCF étaient restées lettre morte, la seule référence à une publication éventuelle dans le “Canard enchaîné” de notre loufoque histoire de billet de train Barcelone-Montpellier en passant par Madrid a eu un effet aussi rapide que miraculeux. Dès notre retour à la maison (sous la neige, comme on l’a vu au dernier épisode), j’ai trouvé dans ma boîte à lettres un courriel clair mais succinct, me demandant non seulement d’oublier cette malheureuse affaire, mais encore de considérer qu’elle n’avait jamais eu lieu. Pour la SNCF, ces billets n’ont jamais été achetés, ils n’ont jamais été émis (même pas à Madrid) et notre carte de crédit n’a jamais été débitée. Le ridicule ne tue peut-être pas, mais il flanque certainement la frousse à de valeureux fonctionnaires. Pour le reste, la reprise du séjour à Montpellier s’est déroulée dans un calme fort reposant, même si la météo faisait un peu des siennes. On a revu le copain guitariste Fethi, toujours actif les midis sur la Place de la Comédie, on lui a remis son cadeau des Fêtes, un joli mouton bien frisé (comme dans “Aménez-l’moutan” chanté par Maurice Chevalier, quoi! Z’aviez pas compris?).
05 avril 2009
Des Chantefort au Lamentin
On a somptueusement bouffé chez les amis italiens du Verdi, on a découvert un ou deux autres bons restos: un couscous royal précédé d’une très bonne pastilla, improbablement cachés tout au bout de la ligne de tram No 1 et d’Odysseum, et un temple intimiste dédié aux pâtes (noires, bien sûr) derrière les Halles Laissac.
Surtout, on s’est fait une paire de nouveaux copains, nos récents voisins du dessous les Chantefort, des “vagabonds” comme nous dont la fille Caroline est en visite ici mais habite Montréal avec son Portugais de mari et sa fillette. Ce qui avait débuté par une rencontre fortuite se prolonge en échanges de pots et de petites bouffes de plus en plus sympathiques tout au long de février...
Michèle et Azur causent voyages et cuisine et santé, André et moi voyages, vins et, surtout de sa part, tauromachie (c’est un authentique aficionado, capable de sauter dans le premier avion vers Madrid ou Cordoue à l’annonce d’une belle affiche). L’escalier du 4e au 5e (et vice-versa) n’a jamais autant servi.C’est donc avec un petit regret que nous avons repris la route de Montréal à la fin du mois dernier -- avec l’obligatoire escale à Paris, où nous nous sommes offert un délicieux repas créole avec les amis Euvrard dans ce qui est sûrement le meilleur Antillais de la Méropole, la Table de Babette, située par un heureux hasard juste en face du Passiflore, rue de Longchamp.
Le court passage du printemps languedocien à l’hiver québécois s’est alourdi d’une tournée des médecins (check-up et prises de sang) et de quelques visites forcées chez le comptable (impôts) et à la banque (soubresauts boursiers). Pas forcément le plus beau des programmes, mais on a compensé en célébrant de digne façon l’anniversaire du beau-frère Jean et en rendant une visite (depuis longtemps due) au Castel Berri des Piazza.
Nous perdons notre conseiller bancaire de 15 ans, Abdel, promu à la direction d’une lointaine succursale. Coïncidence amusante, il est remplacé par le petit-fils de l’ancien premier ministre Jean Lesage -- un presque voisin de ma jeunesse à Québec, dont le fils René était un compagnon de ski au Lac Beauport dans les années ’50.
Après un bref redoux, le thermomètre flirtait de nouveau avec le zéro C lorsque, ce premier jour de printemps, nous avons repris l’avion pour la Guadeloupe puis la Martinique.
Bien sûr, entre clamato, sirop d’érable et médicaments variés destinés au Marin et à Montpellier, nous avions une jolie surcharge de bagages pour le saut de puce entre Pointe-à-Pitre et Fort-de-France. J’ai vainement tenté de faire comprendre à la préposée à l’enregistrement et à une brave dame placée avant nous dans la queue qu’elles avaient tout avantage à nous faire passer devant pour me donner le temps de courir à l’autre bout de l’aéroport payer ma pénalité et revenir récupérer mes cartes d’embarquement sans retarder tout le monde.
Rien à faire. La seconde était assise mordicus sur son droit de préséance, la première insistait que tous les passagers sortant d’une croisière -- une bonne moitié de la cargaison du petit avion -- soient traités ensemble, donc avant nous.
Évidemment, lorsque je me suis rendu au guichet de paiement des surcharges, il y avait cinq personnes devant moi (dont deux payaient par chèque, avec ce que ça impliquait de vérifications complexes et tâtillonnes); à cause de moi, donc, l’avion a décollé près d’une demi-heure en retard. Tout le long du trajet, la madame qui refusait de nous céder le passage me fusillait du regard, si bien que j’ai fini par lui tirer la langue. Na!
Suite à un malentendu, Gérard ne pouvait venir nous prendre au Lamentin, Il avait délégué son petit frère Jean-Christophe... qui s’est décommandé au dernier moment. Heureuse- ment, il y avait un véritable comité d’accueil familial qui nous attendait à la sortie des douanes: Charles et Raphaëlle Larcher du Diamant d’une part, Daniel Philémont-Montout et sa fille Armelle du François de l’autre. Nous n’avions que l’embarras du choix pour nous faire convoyer vers le ponton du Marin.
Petite déception à l’arrivée à bord (because le même malentendu, sans doute) : contrairement à l’habitude, nos affaires -- sauf les vêtements, chasse-gardée de la fidèle et méticuleuse Henrietta -- avaient été jetées en vrac sur un lit au lieu d’être rangées dans leurs tiroirs et placards habituels, et le frigo était vide. Pas grave, nous avions eu la prévoyance d’arrêter “chez Annette”, le supermarché du coin, en venant de l’aéroport.
Les seules denrées alimentaires prévues par Gérard (il commence à me connaître trop bien, celui-là) étaient les apéritifs et alcools, bien en rang dans leur bar. À défaut de mieux, nous avons donc pu célébrer avec les Larcher notre retour qui au ti’punch, qui au porto blanc.
Toutes les premières conversations portaient inévitablement sur LA grève qui venait de secouer les Antilles pendant un mois et demi, et dont les séquelles se faisaient encore sentir : par exemple, pas de bière Lorraine sur les étagères du supermarché, et de grands vides dans les rayonnages réservés aux produits “français de France”. Le consensus clair est que les Antillais “ont gagné” leur bras-de-fer contre l’administration française et le patronat local... mais il y a de furieux débats, qui ne sont pas près de s’éteindre, sur le sens, la portée et la durée de cette victoire.
Difficile de se faire une opinion là-dessus dès notre arrivée des neiges montréalaises et sans avoir vécu nous-mêmes les événements, mais on aura immanquablement l’occasion d’y revenir.
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